Une maison dans les bois, une famille recluse, une mystérieuse épidémie, l’arrivée d’un intrus…Pour son deuxième long-métrage, Trey Edward Schults (Krisha) conte une tragédie humaine minimaliste, à mi-chemin entre le huis-clos atmosphérique et le mélodrame familial. Un excellent film d’épouvante trompe l’œil, à découvrir en salles depuis le 21 juin.
Dans un monde post-apocalyptique, Paul (Joel Edgerton), sa femme Sarah (Carmen Ejogo) et leur fils Travis (Kelvin Harrison Jr.) vivent reclus dans leur grande demeure barricadée au milieu des bois. La petite famille se voit contrainte d’euthanasier le grand-père Bud, contaminé par un mal qui a visiblement décimé la population mondiale. Dans la nuit, Travis détecte la présence d’un intrus à l’entrée de la maison. Paul neutralise très vite l’individu avant d’en faire un prisonnier. Ce dernier se dénomme Will (Christopher Abott) et prétend chercher de la nourriture pour sa femme Kim (Riley Keough) et son fils Andrew (Griffin Robert Faulkner).

Dans le noir, l’horreur guette…
Malgré la méfiance et les mises en garde de Paul, Sarah propose d’accueillir la famille. « La solution la plus intelligente est de vivre ensemble », explique-t-elle à son époux. Elle est ainsi persuadée que l’union fait la force et cette rencontre imprévue s’impose comme une aubaine pour leur survie. Peu à peu, les nouveaux arrivants prennent leurs marques et gagnent la sympathie de leurs hôtes. Le discret Travis semble même fasciné par ses colocataires. Mais la suspicion et la peur troublent progressivement l’entente entre les deux groupes. Lorsqu’un (terrible) incident survient, la discorde s’avère irréversible…
Nombreuses sont les zones d’ombre qui hantent It Comes At Night. À la caméra et au scénario, Trey Edward Schults fait le choix de cultiver le mystère et n’éclaircit jamais l’incident qui déchirera les deux familles et les précipitera vers un affrontement inéluctable et funeste. De même, l’épidémie invisible qui frappe les personnages, n’est jamais expliquée ni véritablement identifiée. Seules les instructions de Paul font office de maigres repères : ne jamais sortir seul en journée, ne jamais sortir la nuit, se munir de gants et d’un masque à gaz…et bien sûr ne jamais accorder sa confiance à autrui.

Une redoutable épure de l’épouvante
Avec un savoir-faire indéniable, le cinéaste distille une tension qui ne faiblit jamais. Peut-on ouvrir sa porte aux étrangers ? Paul est-il frappé par la paranoïa ? Les terrifiants cauchemars de Travis sont-ils prémonitoires ou fantasmés ? Autant d’interrogations qui met bientôt les nerfs du spectateur à rude épreuve. À cet ancrage épuré et nébuleux, le réalisateur y appose des visions d’horreur, minimalistes elles aussi. Un chien aboyant une menace invisible, un corps d’enfant allongé dans l’obscurité, une porte mystérieusement ouverte…It Comes At Night prouve que la peur n’est jamais aussi intense et efficace que lorsqu’elle touche un imaginaire universel et ordinaire.
Riche de ces angoisses primaires, le film n’oublie jamais de jouer avec les attentes du spectateur. L’angoisse est diffuse ; la paranoïa totale. Le cinéaste confine ses personnages dans les salles obscures de la vaste maison. Il prend d’autant plus un risque lorsqu’il tempère son rythme, plongeant ses personnages dans une étrange léthargie. Au cœur de cette tragédie intimiste, l’excellent Joel Edgerton campe un patriarche, prêt à tout pour protéger sa famille malgré ses maigres moyens. Il ne cessera de mettre en garde son fils contre toute attaque extérieures et étrangère. « Tu ne peux faire confiance à personne d’autre que ta famille », lui répète-t-il. Mais ses directives trahissent surtout une grande impuissance, dominée par la peur.

La chronique d’une mort annoncée
Soumis au poids des rapports familiaux, Travis intrigue autant par ses visions cauchemardesques que par ses agissements mutins. Lorsque la nouvelle famille s’installe, le film suggère l’éveil sexuel de l’adolescent auxquelles s’ajoutent peu à peu les prémices d’une éventuelle folie. Tourmenté, ce jeune personnage constitue, à bien des égards, l’une des grandes réussites du long-métrage. Le duel « westernien » entre Paul et Will se révèle tout aussi captivant lorsqu’il ébranle une cellule familiale unie en apparence mais dont les failles se révèlent peu à peu béantes.
Le film donne alors à comprendre qu’il est impossible de recréer l’équilibre d’une société qui a perdu tous ses repères, ses codes et ses normes. Ne reste alors que l’égoïsme pour la survie et le cruel repli sur soi-même. Autant de comportements qui précipitent les personnages vers une conclusion aussi brutale que l’entrée en matière (la mort du grand-père). Nihiliste et violent, le dernier acte saisit à défaut de réellement émouvoir. Pour cause, le monde que décrit l’œuvre n’a plus rien d’humain et ce, bien avant même l’irruption de Will. Bien qu’appuyé et quelque peu classique, le discours allégorique d’It Comes At Night ne manquera pas de tenailler les esprits, des heures voire des jours après son visionnage.
Le titre m’intriguait, et l’idée d’aller au cinéma voir un nouveau film d’horreur au cinéma me tentait bien (même si je suis une grande froussarde xD), mais je ne sais pas encore si j’irai le voir finalement. En tout cas, il a l’air de vraiment tenir en haleine jusqu’au bout.
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Je pense que tu peux le voir sans problème. 🙂 Le film est angoissant mais se détache de l’épouvante classique qu’on nous sert habituellement.
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Ce film mérite d’être vu ! Un puissant film (bien interprété), sans cesse sous tension, sur la survie, l’égoïsme et la peur de l’autre, une bonne métaphore de notre société, avec simplicité et en même temps plus profond qu’il en a l’air.
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Entièrement d’accord avec toi ! Et ça en est revigorant. 🙂
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beaucoup entendu parler de ce film et ta critique fait envie en plus. Excellent weekend Simon ! je crois qu’il passe dans un cinéma ici 😉 🙂
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Merci Frédéric ! J’espère qu’il te plaira autant qu’à moi. 😉
Au plaisir de te lire et bon week-end !
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